L’influence et l’impact que les diasporas peuvent avoir dans le processus de consolidation de la paix ne sont pas un phénomène nouveau, mais depuis quelques années ce dernier suscite vivement l’intérêt de la communauté internationale et particulièrement des acteurs travaillant pour la paix comme les organisations onusiennes.
Tout d’abord, qu’est-ce que la consolidation de la paix? Selon le Comité des politiques du Secrétaire général :
« La consolidation de la paix comprend un éventail de mesures visant à réduire le risque de retomber dans un conflit, par le renforcement à tous les niveaux des capacités nationales de gestion de crise, et à établir les fondations d'une paix et d'un développement durables. » [1]
C’est donc un processus long qui engage la responsabilité du gouvernement, mais aussi celle de tous les individus du pays concerné et c’est en cela que l’on parle de l’importance de l’appropriation nationale dans la consolidation de la paix. [2] Donc, la diaspora même si elle peut être perçue comme étrangère dans son pays d’origine a certainement un rôle à jouer dans la reconstruction post-conflit.
Les diasporas possèdent en effet des avantages non négligeables pour aider au processus de paix tels que [3]:
- « la compréhension du contexte culturel et politique local » ce qui permet un meilleur transfert d’expertise et de compétence ;
- « l’expérience professionnelle et personnelle » acquise dans leur pays d’accueil et leur pays d’origine ;
- agir en tant que conseiller entre les organisations et institutions nationales et internationales ;
- la possibilité d’atteindre des zones isolées ou inaccessibles dans le pays d’origine ;
- « la conviction de bien faire les choses et de les faire pour les bonnes raisons » étant donné l’attachement au pays d’origine.
Qui plus est, on parle même d’un effet de transfert social de normes, de valeurs éthiques, de comportements et de capital social acquis dans le pays d’accueil par les diasporas et transmis aux populations restées dans le pays d’origine. [4]
De récentes études faites auprès de communautés venant de la Corne de l’Afrique ont démontré les bienfaits de leurs initiatives de plaidoyer, et d’initiations aux dialogues entre les parties au conflit. [5]
Il existe donc un potentiel à renforcer leur participation dans des programmes de bonne gouvernance et de processus de démocratisation. [7] De même, leur rôle dans la résolution des conflits s’avère également important pour faciliter la transition vers la paix.
Un exemple de succès souvent cité dans la littérature est celui du rôle qu’a joué la diaspora irlandaise aux États-Unis en usant de son influence pour mettre fin aux campagnes armées de l’Armée républicaine irlandaise provisoire en juillet 2005. [9]
Cependant, les initiatives des diasporas sont souvent faites en silo et donc demeurent difficiles à quantifier. [10] De plus, ce n’est que depuis très récemment que l’on perçoit le rôle positif qu’elles peuvent jouer dans la consolidation de paix.
Même encore aujourd’hui, l’influence des diasporas sur les conflits reste ambigüe. En effet, certaines études ont montré qu’elles peuvent également fournir une aide financière aux partis politiques, aux clans, ou groupes rebelles qu’elles soutiennent dans le pays d’origine ce qui peut au contraire alimenter le conflit. [11]
À la lumière du rôle positif ou négatif que peuvent avoir les diasporas dans le processus de paix, il s’avère donc nécessaire de renforcer leur participation et collaboration dans les projets de consolidation de la paix en misant sur le capital humain plutôt que sur les apports financiers des diasporas. Cette approche ne suggérerait-elle donc pas de réguler les transferts d’espèces? Si c’est le cas, quelles seraient les implications d’une telle approche ?
Mathilde Buchet